Pour résumer, Edmond Couchot, professeur émérite de l’université Paris 8, exprime ce qui fait, à son avis, les quatre qualités de cette thèse :

 » La première est son audacieuse et profonde originalité. Offrir au regardeur la possibilité de plonger corporellement à l’intérieur d’un tableau de Kandinsky (plus exactement de la simulation numérique d’un tableau) pourra scandaliser certains. En réalité, j’y vois là un hommage aussi respectueux qu’inventif à ce peintre et plus généralement à l’art contemporain et passé dont l’auteur a une solide connaissance.  Sophie Lavaud fait la démonstration pratique et théorique que la technologie, bien comprise, est un moyen de renouveler l’interprétation des œuvres passées et d’établir non pas une rupture abrupte, mais une continuité douce entre les régimes de figuration. Continuité symbolique qui compense la discontinuité introduite par la technologie.

La seconde qualité de la recherche est cet aller-retour, permanent et très organique, entre la mise en œuvre matérielle et technique des projets et la réflexion théorique – une réflexion qui mène loin, hors des sentiers battus et des formules rabâchées. Les références de Sophie Lavaud à la philosophie (avec Merleau-Ponty et la phénoménologie) et aux sciences cognitives (avec Varela et le connexionnisme) participent à un renouvellement nécessaire de l’esthétique, en accord avec les changements profonds qui s’opèrent dans le monde depuis quelques années.

La troisième qualité est d’avoir répondu en s’appuyant sur des arguments convaincants à un préjugé très courant qui veut que l’art numérique – quand on veut bien reconnaître qu’il existe – soit un art immatériel, sans chair, et donc un art pauvre. Les dispositifs scénographiques de Sophie Lavaud démontrent le contraire : ils apportent au corps d’autres modalités de perception et d’action face aux œuvres.

La quatrième qualité, enfin, est d’avoir su maîtriser une technologie – qu’on peut dire très « avancées », car elle emprunte à des modèles informatiques encore peu pratiqués dans le domaine artistique – sans se faire piéger par cette technologie. Matrice Active n’est pas une démonstration technique, c’est une œuvre d’art à part entière, complexe et riche, provocatrice et apaisante, moderne et classique. «